Bois de Verrières : le comprendre pour le préserver

« Poumon vert » de notre commune, la forêt domaniale de Verrières-Le-Buisson joue un rôle important d’épuration d’air et de réserve biologique. Organe essentiel à l’équilibre de notre environnement, elle demeure pourtant vulnérable face aux effets du changement climatique, aux piétinements et aux maladies. Sa préservation repose sur la connaissance, l’attention et le respect que nous lui portons.

Sac à la main, des promeneurs s’inclinent au pied des arbres comme pour saluer l’automne. Leur regard attentif fouille la terre, en quête de châtaignes. Dorées par la lumière tamisée des feuillages, elles ne sont pas bien grandes mais suffisent à illuminer les visages. « Nous les ferons sécher puis cuire, bien évidemment », promet Jean, éducateur à la résidence de l’Avenir, à Fontenay-aux-Roses, entouré des résidents volontaires. Sous les châtaigniers, le sol, souvent acide, offre un refuge idéal à certaines espèces de champignons tels que les bolets, les lactaires ou les chanterelles.

« Celui-ci, c’est une tête de moine », affirme Clément avec assurance. Aux côtés de Constance et d’Eugénie, ses
camarades en master Biodiversité, Écologie et Évolution, il découvre pour la première fois la forêt domaniale de Verrières, attiré par la « richesse et la diversité de ses essences ». En semaine, on ne compte que quelques voitures stationnées sur les différents parkings. Hormis des promeneurs, souvent entraînés par leur chien, des joggeurs, cyclistes ou vététistes se croisent sur le réseau de sentiers qui serpentent entre les arbres du massif forestier. Les week-ends, surtout aux beaux jours, la fréquentation devient nettement plus dense.

La nature aussi a besoin de repos

Bien qu’enclavée dans un tissu urbain dense, la forêt domaniale de Verrières demeure un havre pour une faune
sauvage diversifiée. Les amateurs de chants d’oiseaux y reconnaîtront peut-être le cri sec du pic noir, le martèlement du pic mar ou le sifflement clair du loriot d’Europe. En abaissant le regard, on peut espérer apercevoir un écureuil roux. Au sol, les silhouettes élancées des chevreuils se laissent parfois entrevoir, lorsqu’ils ne sont pas dérangés par la sur fréquentation. Car la forêt, elle aussi, a besoin de repos.

À la tombée du jour, lorsque les noctules communes et les pipistrelles entament leur ballet sous la voûte assombrie, fouines, renards et hérissons quittent leur refuge. C’est un autre monde qui se met en mouvement et qu’il convient de ne pas déranger. « C’est notamment pour cette raison que des bornes automatiques (fermées de 22h à 5h) ont été installées à l’entrée de la forêt du côté de Châtenay-Malabry, afin de limiter la circulation motorisée et préserver la tranquillité de la faune », explique Nicolas Friang, responsable de l’Unité Territoriale Ouest-Essonne Chevreuse au sein de l’Office National des Forêts (ONF). L’équipe de l’agence ONF Île-de-France Ouest, gestionnaire de la forêt domaniale a élaboré un schéma d’accueil du public destiné à mieux hiérarchiser la fréquentation du site, à préserver l’équilibre fragile de la faune et de la flore et à répondre aux attentes sociétales donc concilier détente, découverte et préservation.

Pour nourrir cette réflexion, elle s’est appuyée sur plusieurs centaines de contributions recueillies par enquête en ligne, ainsi que sur de nombreux échanges avec le public, notamment lors de la rencontre organisée à la Maison Vaillant le 6 juin dernier. Des associations à vocation écologique, des clubs de course à pied et de VTT ainsi que le centre équestre de Châtenay-Malabry ont également apporté leurs éclairages et leurs attentes. Le schéma, actuellement en phase de finalisation devrait être présenté d’ici à la fin de l’année.

À l’épreuve des changements climatiques

Gardiens de fraîcheur en période de canicule, hêtres, bouleaux, frênes, charmes et autres essences ploient sous la morsure de la chaleur. Et si le manque d’eau ne se fait pas encore trop sentir dans la forêt domaniale, déjà les signes d’un déséquilibre s’y insinuent. Les changements climatiques fragilisent les arbres, les rendant vulnérables entre autres à des champignons microscopiques. « Les atteintes liées à la maladie de l’encre sur les châtaigniers nous ont déjà conduits renouveler 1,5 ha d’une parcelle voilà quatre ans, indique Nicolas Friang. Après l’exploitation des arbres morts ou malades, nous avons planté d’autres essences d’arbres en mélange comme le
chêne sessile, les fruitiers sauvages, de l’érable, du tilleul, des merisiers mais surtout pas de châtaigniers
». En effet, même s’ils reviennent naturellement, ils sont voués à tomber malades et mourir, du moins dans cette zone. « Bien entendu, dans les zones non atteintes par l’encre, nous continuons notre gestion en futaie irrégulière avec du châtaignier et autres essences arrivées naturellement ».

Voilà plusieurs années que l’ONF observe la progression d’espèces plus méridionales sous les latitudes plus froides. Et même si la nature dispose d’une certaine capacité d’adaptation, des changements trop rapides, dans les scénarios les plus sombres, c’est la disparition de certains arbres voire la transformation de milieux entiers qui se profile. « L’objectif n’est pas de bouleverser la composition des forêts mais de favoriser les essences déjà présentes qui résistent mieux aux changements climatiques », précise Nicolas. Le chêne sessile, le cormier, le tilleul ou encore diverses espèces fruitières seraient mieux armés pour affronter l’avenir. Le hêtre, en revanche, peine à s’y projeter et son déclin paraît inéluctable. Dans certaines régions, plus à l’Est, ce sont même des forêts entières d’épicéas qui vacillent. « La forêt de Verrières est quant à elle en bonne santé pour le moment ».

Une forêt trop ouverte ?

Quelques batteries érigées au lendemain de la défaite de 1870 subsistent encore dans les profondeurs boisées.
Durant la Première Guerre mondiale, ces ouvrages militaires servirent d’abris aux blessés. Les photographies
aériennes de l’époque révèlent une canopée bien plus clairsemée qu’aujourd’hui. Les houppiers étaient plus
fins et le feuillage dissimulait moins les sentiers. C’est que la forêt de Verrières a toujours répondu aux besoins de son temps. Ancienne propriété ecclésiastique, elle fut déjà une réserve de bois pour le chauffage mais aussi de
bois de construction, lieu de chasse, de récolte de châtaignes et de promenade.

Mais c’est aussi le défi climatique qui commande aux forestiers d’en repenser la gestion. Les éclaircies effectuées obéissent aussi à une préoccupation écologique. Elles favorisent la croissance d’essences plus résistantes aux maladies et aux sécheresses. La futaie irrégulière, symbole d’une gestion durable où coexistent des arbres de tous âges et de toutes tailles, est privilégiée. Cette approche suppose des prélèvements d’amélioration tous les 8 à 10 ans pour laisser passer la lumière, libérer l’espace et activer des banques de graines contenues dans le sol. Les coupes dites rases ne sont plus pratiquées sauf tempête, incendie ou mortalité importante d’arbres.

Un patrimoine forestier à transmettre

Au sein de l’Unité Territoriale Ouest-Essonne Chevreuse, huit techniciens se partagent la responsabilité de 8 235 ha de forêt répartis sur 85 massifs boisés. Gérald Sivry veille sur les 556 ha de forêt de Verrières ainsi que celle
de la forêt domaniale de Palaiseau et de plusieurs autres forêts de collectivités. Passionné de la forêt, attaché
à la biodiversité et à la sylviculture, il choisit de maintenir davantage de bois mort, au sol comme sur pied, que la
moyenne observée afin de renforcer la biodiversité. Ce parti pris, favorable au cycle naturel de la matière et à la
faune saproxylique, s’étend au-delà du périmètre strict de la réserve biologique intégrale (RBI).

Chaque décision s’inscrit dans la temporalité longue du vivant à l’échelle de la forêt. Car si le plan d’aménagement approuvé en 2025 court jusqu’en 2044, certains choix opérés aujourd’hui sont conçus pour porter leurs fruits à l’horizon de quatre-vingt-dix ans voire plus, soit plusieurs générations de forestiers.
« Nous transmettons un héritage aux forestiers de demain, mais aussi à nos enfants. C’est pourquoi il est crucial de bien concevoir ces documents de gestion à très long terme ».

Dans le secret des forêts

Une fois par an, lors de l’événement Tous en forêt, en septembre, les forestiers conduisent un groupe d’une
vingtaine de curieux dans les profondeurs de la forêt. Ils leur révèlent les subtilités du monde sylvestre, le travail
de l’ONF pour en préserver l’harmonie et répondent aux questions qui affluent. Parfois, on les interroge sur
le cloisonnement d’exploitations – ces couloirs de 4 m de large, espacés de 24 m, permettant le passage du tracteur qui extrait les arbres coupés sporadiquement à la suite de la désignation des forestiers. « Nous évaluons la faisabilité du passage des tracteurs entre les arbres, dans le but de préserver au maximum les beaux spécimens, assure Nicolas Friang.

Ainsi, la majorité de la forêt sera protégée du tassement de sol. La végétation repousse rapidement sur les cloisonnements d’exploitation, favorisant la diversité floristique et faunistique comme les insectes, petits mammifères, amphibiens et chauves souris. Également évoqué, le débardage par câble implique un coût élevé et nécessite aussi la mise en place de cloisonnements. Toutefois, une étude démonstrative est en cours ». Enfin le recours au cheval de trait pour extraire le bois présente un faible rendement. « Il faudrait un très grand nombre de chevaux de trait pour remplacer un tracteur de 200 chevaux pour sortir en moyenne 2 000 m3 par an, sans compter les contraintes logistiques et l’obligation de garantir leur bien-être. Par ailleurs, les entreprises pratiquant le débardage à cheval ont pratiquement disparu, en dehors d’activités à caractère événementiel », explique Nicolas Friang. La mémoire des pratiques anciennes n’est pas perdue pour autant.

« On retrouve encore ces pratiques lors d’événements, avec des démonstrations de débardage à cheval dans des
zones humides
». Ces moments rappellent la continuité d’un savoir-faire, des techniques de sylviculture d’autrefois jusqu’à celles d’aujourd’hui. Un dialogue entre la patience du vivant et l’intelligence des pratiques.

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